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Contribution au colloque "La publicité et le financement de l'audiovisuel public", le 9 mai 2008 au Parlement de la Communauté française

1. C'est quoi, ce colloque?

Le 4 juillet 2007, la majorité donne au Parlement le feu vert pour que la RTBF puisse engranger progressivement davantage de recettes publicitaires (on passe de 25 à 30% de son budget). C'est également l'ouverture à différentes techniques publicitaires jusque-là interdites au service public telles que l'écran partagé.

Ce vote a lieu alors que l'Appel des 100 n'a pas été entendu: cent personnalités de premier plan (culturelles, sociales et politiques) demandaient qu'un vaste débat auprès du public soit engagé sur ce thème avant toute décision, à la manière des Assises culturelles organisées par la Ministre Fadila Laanan http://www.consoloisirs.be/textes/070502appeldes100.html.

Et... que propose d'autre cette majorité PS-CDH, ce 4 juillet 2007? D'organiser un débat au Parlement avec invitation sélective au public sur cette thématique... après que les décisions aient été entérinées. La Libre Belgique commentera: "On vote d'abord, on débattra ensuite".

Ce projet s'est concrétisé le vendredi 9 mai 2008 de 13H00 à 17H00 par l'organisation du colloque "La publicité et le financement de l'audiovisuel public" dans l'hémicycle du Parlement de la Communauté française.

Il ne s'agit donc clairement pas d'un vaste débat auprès du public car:

  • Il se déroule selon un horaire discriminatoire pour la majorité de la population active.
  • Aucun quotidien ou hebdomadaire n'en a publié les informations concrètesen (date, lieu, adresse de contact) qui permettraient au public d'y venir y assister.
  • La petite centaine de personnes qui participaient à cette rencontre appartenaient essentiellement à la sphère politique ou aux "spécialistes" du secteur.

S'agit-il un simple alibi pour se donner bonne conscience ou ce colloque a-t-il été mis en place pour permettre à un grand nombre de parlementaires de s'informer sur cette thématique pour préparer de nouvelles orientations ou décisions?
Notre décompte des parlementaires qui ont assisté à ces travaux est plutôt accablant pour la majorité des partis:

  • 0 parlementaire sur 4 pour le FN,
  • 1 parlementaire sur 40 pour le PS,
  • 2 parlementaires sur 15 pour le CDH,
  • 3 parlementaires sur 25 pour le MR,
  • 3 parlementaire sur 5 pour ECOLO.

Donc sur 89 parlementaires, 80 étaient absents.

Espérons que ces absents auront à cœur de lire les compte-rendus de ce colloque car le débat est loin d'être clos! Il faut dès à présent songer à la préparation du prochain contrat de gestion ertébéen de 2012 et affirmer cette thématique lors de la campagne pour les élections de 2009.

Trois questions

Outre l'intervention que j'ai faite en tant que participant au 3ème panel de cette réunion, j'ai eu l'occasion de poser quelques questions pour tenter d'interpeller le monde politique.

1: Après qu'il ait, une fois de plus, indiqué qu'il était impossible de se passer de la pub à la RTBF, Jean-Paul Philippot, l'Administrateur général de la RTBF, a indiqué que la seule manière de contrer les effets négatifs de la publicité était pour le service public de proposer des émissions d'éducation aux médias et à la publicité. Cet alibi, il l'utilise régulièrement. La dernière fois, c'était lorsqu'il demandait que la RTBF puisse remettre de la pub autour des émissions destinées aux moins de 12 ans.
J'ai alors demandé à Patrick Verniers, Secrétaire Général de la Charte Européenne de l'Education aux Médias ainsi que directeur de Média-Animation, l'une des plus importantes association d'éducation aux médias: "À quand remonte, selon vous, la dernière série d'émissions récurentes d'éducation aux médias proposée par la RTBF sur ses antennes?".
Celui-ci n'a pas réussi à me donner une date et a un peu noyé le poisson. Il a dit en souriant qu'il "...n'était pas historien" de la RTBF, ce qui laisse sous-entendre que les dernières initiatives en la matière commencent à dater... Il a noté qu'il existe également d'autres moyens qu'une émission spécifique pour aborder l'éducation aux médias à la RTBF: "...aller vers un interfaçage entre le service public, l'éducation aux médias et l'éducation permanente".
Il me semble que la direction de la RTBF tient par la barbichette le monde de l'éducation aux médias car, depuis de nombreuses années, elle mène régulièrement la négociation avec lui pour préparer de nouveaux projets à mettre à l'antenne... que le public tarde à voir arriver, depuis... une bonne décade!

2: L'inauguration du complexe cinématographique des Grignoux à Liège ainsi que le Festival du Film Fantastique de Bruxelles ont illustré la mauvaise humeur de la RTBF car les organisateurs de ces activités ont décidé de confier leurs budgets publicitaires à la régie d'un diffuseur privé (TVI) plutôt qu'à celle du service public, ce qui eut pour conséquence une relation moindre de ces événements sur les antennes de la RTBF. Interpellée sur cette thématique au Parlement, la Ministre Laanan a rappelé que "...les émissions d'information de la RTBF ne peuvent jamais être influencées par les accord de partenariat". J'ai voulu m'étonner du fait que cette obligation déontologique ne concernait que les émissions d'information et pas les autres programmes, dit "programme d'animation". Ceux-ci peuvent donc être influencés par les accords de partenariat, ce qui me semble inadmissible.

3: Enfin, je suis intervenu lorsqu'une jeune-femme demanda à Yves Bigot, le directeur des antennes de la RTBF, s'il considérait que "C'est du Belge" était une émission de serice public ou une pâle copie de "Place Royale" de RTL TVI. Mr Bigot battit en touche en indiquant que "C'est du Belge" pourrait évoluer pour devenir le " Des Racines et des Ailes" de la RTBF! J'ai voulu alors stigmatiser la manière dont la RTBF appliquait à la légère ses obligation en demandant au directeur pourquoi, dans le rapport annuel de ses activités destiné au CSA, la RTBF avait rangé cette émission dans la catégorie des émissions d'éducation permanente. Yves Bigot n'apporte aucune réponse cohérente à cette interpellation.


2. L'intégrale de mon intervention

"...Dans la présente intervention, je vais répondre aux questions que m'a proposé Alain Berenboom, le modérateur du 3ème panel axé sur "les missions de service public".

Question A: Comment voyons-nous concrètement l'évolution des missions, des programmes, des "pratiques" de la RTBF si l'on diminuait ou supprimait la pub?

Il y a un premier "préjugé" à dénoncer car il apparaît comme une évidence, ce qu'il n'est pas, tellement il est surmédiatisé tant en France que chez nous.
Si on supprime la pub, on va multiplier les émissions culturelles au prime-time, ce qui n'intéresse pas vraiment le large public, et donc les audiences vont fondre, ce qui à terme remettra en cause l'octroi d'une dotation et donc l'existence même du service public.
Je pense qu'à la RTBF, en terme de volume, il y a suffissamment d'émissions culturelles. Bien sûr, il y a beaucoup à dire concernant le type d'émissions culturelles proposées, leurs formats, leurs horaires, etc. Mais le changement ne serait pas là. Le manque à combler est surtout du côté des émissions plutôt sociales ou consuméristes. C'est là que le manque est criant à la RTBF. C'est ce type de programmes qu'il faudra revaloriser et, eux, sont porteurs d'audiences importantes, s'ils sont axés sur l'investigation et l'impertinence, comme le prouve toute l'histoire de la RTBF.

L'autre faux lièvre à lever, c'est l'argument qu'il faudrait trouver beaucoup d'argent pour créer de nouveaux programmes qui occuperaient les trois heures quotidiennes délaissées par la pub. On peut enfin utiliser ces heures "vacantes" pour remettre en place une vraie politique peu onéreuse de rediffusion, ce qui me semble aussi être une mission typiquement "service public" (les chaînes commerciales aiment moins les rediff car cela peut rétrécir leur audimat aux premières diffusions) et qui est actuellement fort délaissée. Autres programmes bons marchés mais qui peuvent passionner le public que ceux qui consistent à proposer des émissions de plateaux qui valorisent et actualisent les reprogrammations d'archives, comme le fait si bien "Zoom Arrière", émission qui était naguère programmée au prime time et qui aujourd'hui est parquée dans la tranche pour couche-tards de 22H50.

Mais à quoi ressemblerait donc la RTBF sans pub?
Je rêve ainsi à cette hypothèse dans l'une de conclusions de mon nouveau livre "Il faut sauver la RTBF": j'y parle de "...renforcement de la cohésion sociale, d'apprentissage de la citoyenneté ou de développement du savoir..". Et pour moi, ce ne sont pas des mots vains.
Voici un extrait de ce texte: "...Ils peuvent nous faire rêver les téléspectateurs, ces projets d'émissions axées sur la parentalité, sur la résistance à une consommation culturelle de plus en plus mercantile, sur la découverte des enjeux européens ou sur une meilleure connaissance de nos voisins les Flamands. Surtout si elles sont produites et réalisées par des équipes talentueuses comme la RTBF en a si souvent formées, chaque fois qu'elle a eu l'occasion de mettre en chantier des réalisations en prise avec notre temps et notre société.
Il pourrait aussi enthousiasmer, ce service public, s'il utilisait ses pleines pages de pub dans la presse écrite, non pas pour vendre sa fiction "authentique production de chez nous" 7ème ciel Belgique avec un gros plan sur un string, mais plutôt pour mettre en avant des "pratiques" qui le différencieraient des chaînes privées: nous commençons et terminons nos émissions aux horaires annoncés; pas de pub autour des émissions pour enfants; nous ne changeons jamais nos programmes en dernière minute pour concurrencer d'autres chaînes; nous construisons la RTBF avec vous car nous répondons à vos courriers et vous pouvez également contacter notre service de médiation; nous vous expliquons la signalétique jeunesse pour vous aider à mieux exercer votre métier de parents, etc....".

Question B: La pub tue-t-elle ou renforce-t-elle les missions de service public?

-La pub fait perdre un public important à la RTBF, à l'inverse de ce que le "cocon médiatique" laisse souvent entendre sans jamais le prouver.
Or, un contre-exemple éclairant existe mais il est occulté. Jean-Paul Philippot, lui-même, auditionné par les parlementaires, le 24 janvier dernier, a réussi par une petite tromperie (voir encadré à la fin de l'article http://www.consoloisirs.be/articles/lejournaldumardi/080304.html), à éluder ce fait qui gêne manifestement.
De quoi s'agit-il donc? Pendant deux saisons, "L'Hebdo", l'ancètre de "Questions à la Une" fut diffusé dans le corps même du JT de 19H30 et donc sans tunnel de pub. Comparé aux diffusions antérieures à cette période bénie, elles avec tunnel de pub, la seule variante étant donc la présence ou non des annonceurs entre la fin du JT et le début de "L'Hebdo", on constate qu'il y a en moyenne, deux ans durant, 1/3 à 1/4 de téléspectateurs en plus, soit une centaine de milliers d'usagers en plus. C'est, chaque semaine, l'équivalent de pas mal de Forest-National, de Théâtre Royal de Namur ou de Maisons de la Culture d'Arlon ou de Tournai archi pleins...

-La pub ainsi que l'audimat fallacieux (voyez à ce sujet les travaux de Jean-Jacques Jespers) du CIM qui coûte plus d'un million d'euros chaque année à la RTBF, amoindrissent, marginalisent de plus en plus les missions de service public, ce qui distingue de fait le RTBF des chaînes commerciales.

Deux exemples concrets qui montrent bien que la direction de la RTBF, à cause de cette présence publicitaire, est acculée à concrétiser à la marge la lettre plutôt que l'esprit de nombre de ses missions.

1. L'anéantissement de ce qui fait la grandeur d'un service public: s'intéresser réellement aux grandes minorités de la population qui ont des besoins médiatiques spécifiques. Ces besoins ne seront bien sûr pratiquement jamais pris en compte par les médias commerciaux.
Trois exemples de minorités parmi d'autres: le public culturel, les 300.000 sourds et malentendants, le public des enfants.
La Deuxième chaîne télé de la RTBF s'intéressait jusqu'il y a peu à ces publics mais bien entendu, ce challenge ne faisait pas frétiller les annonceurs.
Les directeurs Alain Gerlache et Yves Bigot ont donc transformé cette chaîne pour qu'elle s'approche, comme le disait Mr Bigot dans Vers l'Avenir, "d'un Club RTL". Gerlache, lui, parlait dans le même quotidien "d'une Deuxième chaîne plus divertissante et plus branchée".

Résultat des courses: sur La Deux, la culture passe du créneau de 20H à celui de 22H45 (on crée alors l'alibi très onéreux Arte Belgique vu par une minorité de +ou- 8.000 téléspectateurs de catégorie socio professionnelle élevée, selon les déclarations publiques de Carine Bratzlavsy, le 25 sept. 2007).

Le JT de 19H30 avec traduction en langue des signes, une langue reconnue par La Communauté française en 2003, quitte son créneau d'exposition quotidienne vers 20H00 sur La Deux pour être diffusé la nuit sur La Une, chaque jour à un horaire différent!
Et que met-on à la place? Le feuilleton marseillais "Plus Belle la vie", le programme court "Un garçon, une fille", les talk-shows de Jean-Luc Delarue et les jours où il n'y a pas de sport, essentiellement des séries, des films et des émissions d'humour que l'on retrouvera les jours qui suivent ou qui précèdent chez d'autres diffuseurs.
Le côté pointu du service public financé par 75% du budget de la RTBF alimenté par la dotation est donc relégué à des heures où la majorité de la population active s'apprête à aller dormir, n'en déplaise à Mr Bigot qui déclare dans la presse ne pas s'y faire parce qu'en France cela fonctionne autrement.

2. Un effet pervers de la "règle des cinq minutes" (qui interdit la pub durant les 5 minutes qui précèdent et suivent la diffusion des programmes spécifiquement destinés aux moins de 12 ans).
Aujourd'hui, vendredi 9 mai, sur La Deux, "C'est pas sorcier" commence à 15H30, et "Ici Bla-Bla" à 16H.

Bla-Bla à 16H! Lorsque Bla Bla, il y a quatre ans déjà, commençait 3/4 heures plus tard, soit à 16H45, c'était déjà insupportable. Myriam Katz, la rédactrice en chef du Ligueur avait lancé le brûlot dans son hebdo daté du 16 juin 2004: "Seize heures quarante-cinq: “Bla-Bla” a commencé. De nombreux enfants n'en verront que la fin, faute de rentrer suffisamment tôt à la maison... Certaines mauvaises langues disent qu'en glissant “Bla-Bla” plus tôt dans l'après-midi, notre service public libérait ainsi une tranche horaire plus intéressante pour les annonceurs commerciaux –l'après 18H– puisque, à ce moment-là, le public est d'office collé au petit écran... Il y a peu, les émissions pour enfants sont passées de La Une à La Deux (qui ne se capte pas partout en Belgique), aujourd'hui, elles ont changé de tranche horaire et sont plus tôt dans l'après-midi... Jusqu'où va-t-on les reléguer? Le jeune public faute d'être accessible aux annonceurs, ne compterait-il plus que pour de la roupie de sansonnet?". Interrogée récemment, Mme Katz ne retire rien de ce qu'elle avait écrit à l'époque. La Ligue des Familles et Le Ligueur ne sont pas, que je sache, d'horribles maginaux gauchistes qui ne captent pas la réalité.

Question C: Pour quelles raisons n'est-elle pas cohérente avec ses missions?

Pour des tas de raisons que l'on peut découvrir dans mes autres interventions mais également parce que la pub, par nature, individualise et parce qu'elle recherche une rentabilité immédiate.

Si la direction de la RTBF a supprimé du prime-time des émissions telles "Au nom de la Loi", "Fait Divers", "Cartes sur table", "Autant Savoir", etc., ce n'est pas parce que ces émissions marchaient mal, et elles auraient d'ailleurs pu évoluer, mais parce que la direction pensait pouvoir faire encore davantage d'audience avec non pas des émissions de type socio-économique ou consumériste mais bien avec des émissions qui individualisent davantage comme "C'est la vie" car celles-ci ont un potentiel émotionnel particulièrement élevé, dans la lignée des concepts de Delarue ou des premières émissions de télé-réalité.
Cette stratégie commerciale à l'antipode du service public n'a pas marché et on assiste à un retour en arrière programmatique actuellement. La direction est bien obligée de faire désormais "du service public" presque malgré elle!
Cette tentative me semble aller dans le sens d'une télévision soumise aux impératifs publicitaires et non pas d'un service public qui est au service d'une communauté d'habitants, de citoyens.
Si cela avait été le cas, il y aurait eu davantage une volonté de respecter ces deux tendances – l'aspect sociétal, socio-économique, et, d'autre part, l'aspect plus individualiste – de la part de la direction ertébéenne.

Bien sûr, une télévision au service du bien commun d'une collectivité n'est pas rentable dans l'immédiat puisqu'elle doit tenir compte de la formation des citoyens, préparer une société aux changements à opérer pour mieux vivre ou tout simplement survivre, etc. Cette façon d'être est toujours minoritaire dans une société donnée et joue un rôle de précurseur. Mais sans elle, on fait du "sur place" et l'on retourne progressivement vers la barbarie. Or, pareille avant garde est indispensable et façonne notre avenir. On peut donc parler de rentabilité sociale, carrément humaine, à moyen ou long terme. Tout l'inverse d'une recherche publicitaire.

On soutient partout les concepts de "diversité culturelle" et de "droits des minorités". Pas en audiovisuel? Une majorité de la population est opposée à la publicité. La pouvoir politique ne doit-il pas dès lors organiser le paysage audiovisuel pour qu'il y ait au moins une chaîne sans pub?
Que doivent faire les citoyens actifs qui tentent de faire évoluer leurs propres comportements de consommation pour tenter de contrer les menaces du réchauffement climatique: regarder la RTBF et ses programmes publicitaires de plus en plus prégnants?

Question D: Serait-il possible de cadrer la pub dans l'audiovisuel public?

-Non, car la nature même de la publicité est inconciliable avec les objectifs particuliers des médias publics.
Dans ses "Humoeurs" du 16 avril 2008, dans Télémoustique, Marc Moulin explique de manière limpide pourquoi la pub n'est pas compatible avec le servi ce public:
"...La pub veut rassemble devant le téléviseur une famille complète, de préférence autochtone, jeune et suffisamment aisée pour consommer plus que le nécessaire (...) La pub et la télé ne s'intéressent pas à des "cibles" comme les plus de 50 ans, représentant 50% de la population en Belgique, mais qui changent trop peu d'habitudes de consommation. La pub ne s'intéresse pas aux consommateurs peu performants – ceux qui n'achètent que l'indispensable. Or, le service public doit, au contraire, s'adresser par définition à tous ces publics, au maximum d'entre eux et pas forcément en même temps, ce qui fait toute la différence".

-Le pouvoir politique a placé la direction de la RTBF devant un dilemme impossible qui a, pour conséquence, que jamais l'audiovisuel public ne pourra encadrer la pub et que celle-ci jouera toujours d'une influence excessive dans les choix de cette direction.
En effet, les 3/4 du budget de la RTBF est assuré par la dotation, mais celle-ci est donnée quasi une fois pour toute. On n'a jamais vu l'Etat la reprendre. Et dans le meilleur des cas, elle est toujours en augmentation. En cas de non respect de ses obligations, jamais la RTBF n'a dû payer une amende conséquente. Par exemple, quand la création de l'agenda associatif "Ca bouge" accusa un retard de 26 mois, c'est autant de tournage d'émissions économisées par la RTBF. C'est presque de l'incitation à retarder l'application des obligations pour tout bon gestionnaire!
D'autre part, comme la RTBF n'arrive pas à attendre les 25% de son budget, et bientôt les 30%, elle est bien entendu toujours tentée d'en faire un maximum pour conquérir ces % manquants. Elle crée donc des programmes favorables à l'intéressement des annonceurs, et même s'ils ne correspondent pas à des prioritées indiquées dans son contrat de gestion, elle leur prévoit des budgets confortables et des horaires en prime time. C'est la cas, par exemple, de "C'est du belge", l'hebdomadaire de l'actualité des princes et de notre aristocratie. Par contre, après ses deux ans de retard, l'agenda associatif sera créé et disposera un budget dérisoire de 500 euros par numéro et sera le plus souvent diffusé à des horaires confidentiels. Et on peut ainsi multiplier les exemples...

De plus, la publicité coûte très cher à la RTBF. Par exemple, c'est à cause d'elle que la RTBF a créé 3 nouvelles chaînes radios... mais pour conquérir de nouveaux budgets d'annonceurs, il faut financer ces chaînes, leurs programmes, leur personnel, les studios et la promo... Ainsi, le mirage publicitaire pousse la RTBF toujours à devenir plus grosse que le bœuf pour alimenter un territoire d'auditeurs et de téléspectateurs grand comme un mouchoir de poche... Ces ambitions coûtent et il est dès lors logique que la direction de la RTBF tentent prioritairement d'atteindre ses 25 ou ses 30% de rentrées publicitaires, et que l'accomplissement des missions devienne parfois un fardeau auquel on consacre le moins de promo, de budgets et d'horaires attractifs. Ce cirque est sans fin et finira très mal. Voilà pourquoi il faut crever l'abcès de cette surenchère permanente. Faire moins mais très bien, à la dimension de notre territoire, et donc redevenir un vrai service public. On n'a plus besoin du CIM puisque ses chiffres ne sont récoltés que pour établir la tarification publicitaire. Et le qualimat explosera. Et le public pourra être à nouveau fier d'alimenter la dotation...".
La ministre Laanan a été interpellée sur ce thème au parlement et "a renvoyé la patate chaude au CSA, chargé, dit-elle, de “contrôler la diffusion des programmes et les campagnes de promotion de la RTBF”." Vers l'Avenir, 26 octobre 2007.
Mais, seules des chaînes sans publicité, telles Arte ou la BBC, semblent capables d'un tel exploit!


Bernard Hennebert
bernard.hennebert@consoloisirs.be



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