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Question au Parlement de la Communauté française

Ce 19 février, le parlementaire Jean François Istasse (PS) a posé une question sur l'accessibilité des musées au Ministre de la Culture Christian Dupont (PS).

Voici la question du Sénateur et la réponse du ministre:


Parlement de la Communauté française
Séance publique- janvier 2004

Question orale de Jean-François ISTASSE, parlementaire, chef du Groupe PS PCF, adressée à Monsieur Christian Dupont, Ministre de la Culture, de la Fonction publique, de la Jeunesse et des Sports, relative à l’accessibilité des musées


Madame la Présidente,
Mesdames et Messieurs les Ministres,
Chers Collègues,

Le 4 juillet 2002, sous l’impulsion de votre prédécesseur, notre Communauté se dotait d’un dispositif de qualité en vue de soutenir efficacement nos musées. J’ai nommé le décret relatif à la reconnaissance et au subventionnement des musées et autres institutions muséales.

A l’occasion des travaux parlementaires, mon groupe a fortement insisté sur l’ouverture et l’accessibilité aux publics, qui doit constituer un pivot majeur des critères muséaux requis.

Nous avons mis l’accent plus particulièrement sur les publics les plus fragiles, qui devaient bénéficier d’une attention spécifique afin que ces joyaux de notre patrimoine que sont nos musées leur soient réellement ouverts. Nous soulignions également l’importance de renforcer toutes collaborations avec les écoles.

Plus récemment, j’ai interrogé au Sénat la Ministre de la politique scientifique afin de connaître son avis sur l’éventualité d’étendre la gratuité dans les Musées fédéraux à des publics et périodes plus larges que ne le permet actuellement l’arrêté royal du 1er février 2000 (et les arrêtés ministériels y afférents).

En effet, il m’apparaît essentiel de travailler sur cette question de gratuité qui constitue l’un des éléments de l’accessibilité.

Mais je pense également qu’il est indispensable de travailler dans la cohérence, et c’est pour cela que je me permets de vous interroger aujourd’hui.

Du côté fédéral, il m’a été répondu que l’Observatoire des publics des Etablisssements scientifiques fédéraux remettrait un rapport visant à évaluer les attentes du publics en la matière et prendre en compte l’impact budgétaire de la mesure.

Du côté de la Communauté française, envisagez-vous de travailler sur la gratuité (partielle ou totale), au profit de quels publics, avec quels partenariats, et quelles options financières pour compenser l’éventuel manque à gagner?

Pourriez-vous, compte tenu de la mise en œuvre du nouveau décret, nous indiquer quelles sont vos pistes de travail en matière d’accessibilité (via la gratuité, les collaborations entre opérateurs, la mobilité, l’analyse des pratiques culturelles et freins observés pour la fréquentation des lieux culturels en général et des musées en particulier)?

En effet, je sais par exemple que le renforcement du lien culture-école est une priorité absolue que nous partageons. Les musées me paraissent être l’un des partenaires crédibles pour avancer dans le sens d’une plus grande perméabilité et collaboration entre ces deux mondes (culture et enseignement). L’exemple du Musée de la Photographie est éloquent à cet égard.

C’est donc avec une volonté de vous apporter tout mon soutien et ma collaboration que je désire que vous nous fassiez part de vos réflexions sur un sujet qui me tient particulièrement à cœur. Il s’agit, en clair de poser un jalon de plus pour pallier la rupture culturelle qui existe, voire même s’accentue entre certains publics et les lieux et outils culturels.

Je vous remercie de votre attention.
Jean-François ISTASSE


En réponse à votre question relative à l'accessibilité des Musées, j'ai l'honneur de porter à votre connaissance les éléments d'information suivants:

Sur les quelques 470 Musées que compte aujourd'hui la Communauté française, la plupart proposent un droit d'entrée extrêmement modique, voire la gratuité, pour leurs expositions permanentes, et un droit d'entrée souvent peu important pour les expositions temporaires.

La gratuité d'accès totale au Musée ne me semble pas constituer un projet très sain. En cause, le très nuisible sentiment malheureusement trop répandu que ce qui est gratuit est sans valeur, sans intérêt.

J'en veux pour preuve l'exemple du Musée royal de Mariemont, dont les statuts viennent d'être modernisés, parallèlement à un travail de revalorisation globale de l'institution. Depuis 1983, ce Musée était d'accès gratuit. Seules les expositions temporaires étaient d'accès payant, et ce depuis 1995. Cette situation a révélé plusieurs lacunes, dont le manque de perception de la part du public de la très grande valeur des collections du Musée et, par là, un manque de respect des lieux. L'aspect peu pratique de la perception du droit d'entrée pour les expositions temporaires, et son caractère décourageant a également été mis en évidence.

Sur proposition conjointe de la Direction du Musée et de l'Administration générale de la Culture, j'ai marqué accord sur une nouvelle politique tarifaire.

Celle-ci constitue une expérience pilote inédite en Communauté française.

Deux systèmes de tarification seront appliqués.

Le premier sera perçu dans le cadre des grandes expositions de prestige. Le prix plein, 4 euros, reste accessible à tous; les réductions sont importantes et privilégient les enfants et les étudiants. Ainsi une famille avec deux enfants peut entrer au Musée pour un budget de 10 euros.

Le second système sera perçu en-dehors des grandes expositions temporaires. Le prix des visites guidées sera maintenu mais le droit d'entrée sera perçu comme une "contribution volontaire" une suggestion de contribution plutôt qu'un tarif fixe.

Une évaluation et le cas échéant un maintien ou une modification de ce double système seront proposés d'ici à 2005.

Un autre exemple est celui du Musée des Arts contemporains au Grand-Hornu, qui organise quant à lui une journée de gratuité totale par mois, très astucieusement intitulée la "Journée des partenaires" afin de visibiliser les entreprises mécènes et sponsors du Musée, grâce auxquelles le premier mercredi de chaque mois peut être d'accès gratuit.

Outre cette journée, chaque lendemain de vernissage est une journée "portes ouvertes", donc gratuite également.

Chacune de ces deux grandes institutions propose une réponse différente à la question de l'accessibilité économique, dans le respect des missions du Musée, dont la valorisation du potentiel patrimonial et artistique et l'équilibre financier de l'institution.

S'il est vrai que le prix d'entrée occupe une place importante dans la liste des éléments qui se dressent sur la route de la diffusion culturelle, il en existe d'autres.

Je pense surtout aux barrières culturelles, créées par les inégalités sociales.

Plusieurs études consacrées aux pratiques culturelles ont montré que le public concerné par la diffusion culturelle, et donc notamment la fréquentation des Musées, se retrouve essentiellement dans les populations les plus scolarisées.

La gratuité n'est donc pas le garant d'un accès équitable. Elle peut constituer un incitant mais ne suffit pas, seule, à créer l'habitus, à induire la démarche de se rendre dans les lieux de Culture.

Par ailleurs, plusieurs expériences ont montré qu'il arrive que, quelque soit le critère selon lequel elle est accordée, la gratuité présente un risque de stigmatisation du public qui en bénéficie.

Le texte du nouveau décret relatif aux musées et institutions muséales définit très clairement les fonctions muséales, les critères muséaux et la notion même de "Musée".

Au sein de ces critères, celui de l'approche dynamique des publics socialement et culturellement diversifiés occupe une place importante.

La clé de l'intégration et de l'épanouissement par la Culture doit passer par cette approche dynamique, ce travail quotidien de recherche de proximité avec tous les publics.

Ce constat a fortement inspiré le travail sur les liens entre Culture et Ecole.

Le 4 février dernier, j'ai déposé sur la table du Gouvernement un avant-projet de décret relatif à la promotion des activités artistiques et culturelles à l'école. Mon ambition est de renforcer de manière durable le lien culture-école en provoquant la rencontre de deux mondes qui ne se connaissent pas forcément bien: je veux parler du monde de la culture et du monde de l'enseignement. Le dispositif imaginé est celui d'un appel à projets lancés auprès des opérateurs culturels. Ils pourront ainsi mettre en œuvre un projet culturel et artistique à vocation pédagogique et ce, en collaboration étroite avec un établissement scolaire de leur choix. Cette synergie, pour être acceptée et donc subventionnée, devra intégrer le cursus scolaire de l'école sur une période d'au moins un an. Des conventions spécifiques sont prévues pour les projets pluriannuels, étalés sur deux ans ou trois ans au maximum.

Les activités imaginées par l'opérateur culturel ne devront pas se dérouler exclusivement à l'intérieur de l'école. Nous encouragerons la découverte in situ de nos différentes institutions culturelles et notamment celle des Musées bien entendu.

Outre cette approche ciblée vers les enfants et les étudiants, plusieurs actions de mise à disposition de l'information vers tous les publics ont été mises en œuvre dernièrement.

Le "Guide des musées", répertoire très pratique de toutes les institutions en Communauté française, a été édité par la Direction générale de la Culture en 2003.

Le site portail des musées www.lesmuseesenwallonie.be, réalisé fin 2002, continue d'être l'objet d'un investissement important, ce qui assure sa mise à jour et son amplification.

Le Printemps des Musées, qui cette année aura lieu le 2 mai sur le thème "Histoire, histoires. De l'évènement historique aux faits divers", est encore un exemple de l'action de la Communauté française en matière d'accessibilité, et de promotion.

Ce jour-là, les Musées volontaires proposent soit la gratuité, soit une série d'activités sur le thème annoncé à des tarifs préférentiels, voire les deux. En participant à cette action, ils bénéficient d'une campagne de promotion prise en charge par la Direction générale de la Culture, sur l'ensemble de la Communauté française.

Contraindre les Musées participants à la gratuité n'était pas possible, car le manque à gagner aurait du être compensé, ce qui intenable en regard des budgets actuels.

Enfin, une réflexion globale sur le thème de l'accessibilité aux Musées a été confiée à l'Observatoire des politiques culturelles, sous la forme d'une enquête quantitative et qualitative du secteur muséal en Communauté française. Le résultat de ce travail sera disponible dans le courant 2004.

C'est sur base de cette recherche que je déciderai quelles sont les mesures à prendre et comment les rendre efficaces.

Comment, en un mot, répondre à cet important défi qu'est l'élargissement des publics fréquentant les institutions muséales de la Communauté française.

Christian DUPONT



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