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Rubrique "À l'écoute des usagers du temps libre" de Bernard Hennebert

N°17 | Nouvelle plainte contre AB3
Le Ligueur du 15 janvier 2003

Le 20 novembre dernier, devant le Conseil Supérieur de l'Audiovisuel, Claude Berda essaie en vain de se justifier. Producteur de nombre d'émissions "jeunesse" naguère contestées de TF1 (Dorothée, Hélène et les garçons, etc.), il tente d'éviter, aujourd'hui, la condamnation par l'organe de régulation de "Ça va se savoir" dont il a écrit différents scénarios.

Comme toutes les autres auditions du CSA, cette séance est publique(1), ce qui nous permet de détailler le discours de M. Berda. Pour lui, l'émission contestée d'AB3, c'est "du théâtre". Il cite volontiers la Comédie Française, le théâtre de vaudeville, Feydeau et parle même "...d'illustres prédécesseurs". Il semble d'ailleurs avoir envie de faire la morale aux membres du CSA: "Je ne veux pas me comparer aux auteurs classiques mais je vous rappelle que Molière a été excommunié car il parlait de cocus. Il s'est même fait enterrer dans un cimetière en cachette".

Après le sadisme

Oublie-t-il que le CSA français a, naguère, lourdement condamné l'une de ses productions? "Club Dorothée" avait, en effet, proposé aux enfants des scènes comportant du sadisme et de la violence. Sans complexe, le président d'AB Groupe présente aujourd'hui l'émission contestée d'AB3 comme une production qu'il ne craindrait pas d'être vue par son fils âgé de dix ans: "Les problèmes de couples sont moins graves que la violence que l'on voit tout le temps... C'est un industriel et un père de cinq enfants qui vous parle! Je suis particulièrement attentif à la protection de la jeunesse. Il ne faut pas isoler les enfants". Et donc, il serait éducatif de proposer aux plus jeunes, jour après jour, des scènes d'engueulades musclées entre conjoints qui s'envoient le plus souvent en l'air, avec l'ami, le patron, le voisin ou la femme de celui-ci.

Laissant d'abord croire, au mois de mai dernier, qu'il s'agit de gens réels qui se débattent sur scène, puis affirmant que quelques acteurs seront utilisés au début de la série pour "amorcer la pompe" des vrais témoins, les responsables de l'émission ne cachent maintenant plus leur jeu et M. Berda confirmera que "...Le texte est écrit et appris par cœur". Ce n'est que tout récemment qu'AB3 a enfin appliqué complètement la recommandation de notre CSA: signaler la présence des comédiens en début et en fin d'émission et afficher leurs noms dans le générique qui clôture chaque diffusion. Le CSA devrait mieux préciser la taille de ces avertissements —comme cela va enfin être le cas pour les "avertissements santé" sur les paquets de cigarettes— afin qu'ils soient davantage visibles. D'autres problèmes doivent également être résolus: à quoi servent ces avertissements si le contenu même de l'émission laisse implicitement et fallacieusement croire l'inverse! Dans "Parlons-en", une autre émission du même tonneau, les comédiens sont traités de "témoins"!

Après France 2

L'ancienne Présidente de France 2, Michèle Cotta participait également à cette audition en tant que Présidente d'AB Sat. Il fut curieux d'entendre l'ancienne patronne du service public français oser déclarer: "On a choisi la signalétique qui nous semblait correspondre...". La présente chronique du Ligueur a démontré à trois reprises(1) qu'il n'en était rien et qu'AB3 avait choisi un pictogramme qui lui permettait de diffuser "Ça va se savoir" à n'importe quelle heure. Le 18 décembre dernier, le CSA a annoncé sa décision: l'émission doit être signalé par un triangle blanc sur disque orange et diffusée après 20 heures. Aucune sanction financière n'a été infligée et AB3 devra avant la mi-mars 2003 diffuser sur son antenne à trois reprises vers 19H30 un avis qui détaille le contenu de sa condamnation(3).

Récidive d'AB3

Ce 3 janvier 2003, "Ça va se savoir" est toujours programmé avant 20h avec sa signalétique inadaptée. Depuis plus de six mois donc (notre première plainte date du 22 juillet dernier), le CSA est averti que ces images inadaptées aux enfants se diffusent chaque jour en début de soirée. Faudra-t-il attendre la fin naturelle de la série pour que AB3 arrête de narguer l'organe de régulation en diffusant trop tôt une émission qui, selon la notification de la condamnation du CSA, "est de nature à troubler le jeune public en ce qu'elle inspire aux mineurs une perception des relations interpersonnelles non respectueuse de la dignité humaine"... À juste titre, dans Le Soir du 20/12/2002, Fernand Letist écrit: "Il est à espérer que le nouveau décret de l'audiovisuel(4) donne au CSA un pouvoir d'action et de sanction plus franc".

Nous portons donc plainte auprès du CSA contre cette récidive. Quand il s'agissait de trouver une heure de diffusion plus propice pour son journal télévisé, AB3 n'a pas attendu quinze jours pour faire évoluer sa programmation! Le CSA acceptera-t-il de voir complètement naufrager sa crédibilité ou instruira-t-il le plus rapidement possible cette nouvelle plainte et infligera-t-il enfin une sanction davantage dissuasive à AB3?

Bernard Hennebert
bernard.hennebert@consoloisirs.be

(1) Hélas, le CSA ne promotionne pas l'annonce de ces auditions souvent passionnantes. Pour connaître leurs horaires: 02/349.58.80. Pourquoi le CSA les indiquerait-t-il pas sur la page d'accueil de son site internet? Nous posons cette question à sa Présidente, Mme Lentzen.
(2) Voir nos chroniques 2, 5, et 14.
(3) Pour découvrir le texte complet de cette condamnation, demandez au CSA (Rue Jean Chapelié, 35 - 1060 Bruxelles) de recevoir régulièrement son trimestriel gratuit "Régulation".
> Site internet du CSA: www.csa.cfwb.be
(4) Les parlementaires vont l'examiner prochainement. Tireront-ils enseignement de cette récidive d'AB3?



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